L’étape de la comparaison des solvants est souvent perçue comme la plus difficile, particulièrement pour les questions de santé et de sécurité du travail.

A) Modèle à colonnes

B) Rapport de danger de vapeur (VHR)

C) Autres méthodes

A) MODÈLE À COLONNES

Smola a proposé une méthode appelée « modèle à colonnes »  pour comparer des substances dangereuses entre elles à partir uniquement de leur fiche de données de sécurité (FDS). Bégin et coll. ont résumé son document en français (voir § 3.1 et annexe II dans leur rapport R-567). Le règlement allemand TRGS600 donne un exemple détaillé de l’application du modèle à colonnes pour le nettoyage de freins dans un atelier de réparation automobile. Le modèle à colonnes est cependant tributaire des phrases de risque, disponibles uniquement sur les FDS européennes. Smola a produit une version plus récente du modèle à colonnes, basé sur les codes H (codes des mentions de danger pour les dangers physiques et pour les dangers pour la santé) du Système général harmonisé de classification et d’étiquetage des produits chimiques (SGH). Ce dernier est intégré au SIMDUT canadien. Même si les phrases de risque et les codes H ne sont pas disponibles au Canada, le modèle à colonnes est utilisable en employant la matrice de Ripple pour comparer les substances entre elles.

B) RAPPORT DE DANGER DE VAPEUR (VHR)

Le rapport de danger de vapeur (« Vapour Hazard Ratio », VHR) est une autre méthode relativement simple de comparaison des solvants. Puisque les solvants ont des volatilités différentes, il n’est pas possible de comparer directement leur valeur limite d’exposition professionnelle (VLE). Le VHR permet cette comparaison en corrigeant pour la volatilité des solvants. Il se définit par l’équation suivante :

equation 1

Csat = concentration de vapeur saturante en parties par million (ppm)

VLE = valeur limite réglementaire (p. ex. les valeurs d’exposition admissibles du RSST) ou basée uniquement sur des critères sanitaires (p. ex. les TLV de l’ACGIH), en ppm

et

equation 2

P = pression de vapeur du solvant à une température donnée (p. ex. 25 oC)
Patm = pression atmosphérique à la même température

Il est possible de calculer des VHR pour des mélanges de solvants en pondérant par la fraction molaire, ce qui donne l’équation suivante :

equation 3

VHRm = VHR du mélange m

i = solvant i

n = nombre de solvants dans le mélange m

xi = fraction molaire du solvant i (le rapport du nombre de moles du solvant i au nombre total de moles du mélange m)

VLEi = valeur limite du solvant i

Les masses moléculaires et les pressions (ou tensions) de vapeur des solvants nécessaires aux calculs peuvent être trouvées dans des banques de données telles que le RepTox.

L’utilisation du VHR est illustrée dans une étude de cas de substitution de solvant pour le nettoyage de disjoncteurs haute tension.

C) AUTRES MÉTHODES

D’autres méthodes de comparaison des solvants plus complexes sont présentées dans le rapport R-567. Elles prennent en compte d’autres facteurs en plus de la volatilité et les VLE des solvants, p. ex. le danger cutané et l’inflammabilité.

Le logiciel gratuit PARIS III (Program for Assisting the Replacement of Industrial Solvents) permet à l’utilisateur d’identifier un solvant unique ou un mélange de solvants techniquement performant (pouvoir de solubilisation) et aptes à remplacer un solvant ou un mélange de solvants jugé inacceptable des points de vue environnementaux et sanitaires. Le mélange à remplacer peut contenir jusqu’à quatre solvants. La base de données de PARIS III contient environ 4000 substances chimiques.

Un autre logiciel (HSPiP) vise quant à lui à utiliser les paramètres de solubilité de Hansen pour prédire le comportement de certains mélanges. Une étude de cas visant à substituer certains solvants d’imprimerie est un bon exemple de l’utilisation de cet outil.

Des chercheurs de l’université Karel de Grote (Anvers, Belgique) proposent le logiciel SUSSOL (Sustainable Solvents Selection and Substitution Software) pour le choix du solvant le plus vert dans une application donnée. Le logiciel utilise un réseau de neurones artificiels pour analyser les 553 solvants de sa base de données afin de produire une carte groupant les solvants substitutifs envisageables, classés en fonction de scores de santé, de sécurité et d’environnement. Dans un article en libre accès, les auteurs présentent trois exemples concrets d’utilisation du logiciel : 1) remplacement de la N-méthyl-2-pyrrolidone en synthèse chimique (fluoration); 2) remplacement du toluène pour dissoudre du néoprène chez un fabricant de produits d’étanchéité et d’adhésifs; 3) caractérisation d’un nouveau solvant vert, le 2,2,5,5-tétraméthyltétrahydrofurane.

Dans le cadre d’un projet de recherche européen impliquant notamment l’INERIS, l’« Istituto di Ricerche Farmacologiche Mario Negri » de Milan a développé le logiciel ToxEraser Solvents. Ce gratuiciel propose de remplacer un solvant donné par d’autres solvants en fonction des critères utilisés par les quatre outils suivants : SUSSOL, Solvent Selection Tool, Safer Chemical Ingredients List, SIN List. Remarque : le logiciel demande de saisir la représentation SMILES du solvant à remplacer. L’utilisateur de ToxEraser Solvents trouvera le SMILES de tout solvant dans la base de données en ligne PubChem.